la solution n'est pas dans l'annulation de la dette.

La dette dans son contexte global sert à désigner l'ensemble des emprunts et engagements financiers contractés par une entité privée ou publique auprès de tiers, établissements bancaires ou autres pays, pour financer son fonctionnement. De ce fait, la dette est un mécanisme important permettant d’avoir des marges de manœuvres financières nécessaires à l’atteignement des objectifs d’une entité.

Dans son allocution devant l’assemblée générale de L’ONU, le président de la république, Felix Antoine Tshisekedi a réclamé une annulation totale de la dette pour les pays en développement afin de les aider à surmonter la pandémie, mieux se reconstruire et que toutes les mesures de soutien ou de financement supplémentaire de pays en développement ne devraient être liées à aucune condition. Cette allocution est intervenue dans un contexte de pandémie global, COVID 19, qui depuis le début de l’année inflige au monde entier une crise sanitaire et économique d’une ampleur non encore vu à ce jour. Cette crise accentue la complexité majeure des pays en voie de développement, des pays africains et de la RDC en particulier. Elle intervient alors que le budget du pays subissait déjà les conséquences de la baisse des prix des matières premières et de ralentissement de l’activité économique. Dans cet environnement de baisse brusque des recettes budgétaires, plusieurs dépenses restent contraignantes comme celles liées au fonctionnement des institutions de la république, au respect des engagements financiers vis-à-vis des différents bailleurs, à la sécurité du territoire, à la lutte contre les épidémies et maladies tropicales, et à la poursuite des dépenses sociales déjà entamés.

Face à la disruption causée par la pandémie, les instances internationales : le FMI, la Banque Mondiale, le G7 et le G20 se sont réunis du 14 au 17 avril durant les réunions du printemps. Ces réunions ont débouché sur plusieurs résultats concrets, tels que la suspension du paiement du service de la dette des états les plus pauvres et la mobilisation totale des instruments financiers visant à contenir les impacts économique et financier de la crise. Ces solutions, malgré la marge budgétaire direct qu’elles offrent, ne répondent pas à la problématique et aux défis du pays mentionné ci haut et présentent un risque à moyen et à court terme. Effectivement, les dépenses de l’état sont appelées à croître de façon progressive pour contrer l’évolution de la pandémie alors qu’il faut continuer à affronter les défis du développement du pays, la sécurité du territoire et la vision du chef de l’état. Face à ce défi, s’ajoute la chute considérable des recettes due à la baisse des prix des matières premières, qui vient réduire davantage la marge budgétaire de l’état, qui s’est matérialisé par une loi des finances rectificative de l’exercice 2020, passant de 11 milliards $ à 5.7 milliards $. L’annulation de la dette ou la suspension du paiement du service de la dette telle que proposé constitue, une faveur de la part des créanciers et n’offre pas des solutions structurelles efficaces aux difficultés de l’état.

Par conséquent, une annulation de la dette ou un allégement de cette dernière dégradera l’image de la RDC auprès des agences de notations, qui pourront sanctionner le non-respect d’une échéance de prêt, décision qui impactera les efforts assortis pour améliorer le climat des affaires et augmentera la perception du risque d’insolvabilité de l’état. Même si la notation n’a pas pour but d’impacter les marchés boursiers, en effet, une dégradation d’une note est presque inéluctablement suivie d’une baisse du coût du titre visé. Les investisseurs sont très attentifs aux notations et modifient leur attitude d’investissement en fonction des ratings. Tout en gardant à l’esprit que l’annulation de la dette opérée, durant la dernière décennie a entaché l’image du pays, vis-à-vis des créanciers et des bailleurs bilatéraux qui du reste sont revenus à la tache de financer notre état que par l’octroi des dons.

Au regard de la faiblesse de la mobilisation des ressources, de l’épargne nationale et de la baisse des dépenses du secteur privé, la dette bien structurée (meilleure condition de coût et de durée) orienté vers les projets d’investissement porteur d’externalités positives, qui augmentent suffisamment la productivité économique est essentielle pour mettre notre économie sur un sentier de croissance soutenue et durable.

Dans ce contexte, il serait important de pouvoir revisiter notre approche vis-à-vis de la dette en approfondissant des options tel que :

  • La participation aux discussions sur la scène internationale à la mobilisation d’une nouvelle liquidité en lieu et place d’une annulation pour apporter une réponse rapide et efficace aux défis de développement.
  • La mise en place d’une stratégie d’endettement qui fixera les objectifs et cibles du portefeuille de la dette de l’état. Elle permettra d’encadrer les actions d’endettement (Quand et Pour quels objectifs ?) tout en gardant, une cohérence entre la capacite actuelle et futur de remboursement (analyse de viabilité).
  • La production d’un plan d’emprunt (borrowing plan) retraçant la liste des projets au courant de l’année pour lesquels des financements additionnels seraient indispensables.
  • L’utilisation de la stratégie de reprofilage afin de modifier le profil de nos dettes, en allongeant la maturité de notre dette afin de faciliter son remboursement.

Ainsi, dans une optique de pouvoir recourir à des mécanismes innovant de financement, la RDC pourra tirer avantage d’un changement de stratégie vis-à-vis de la dette afin de mobiliser des ressources additionnelles pour faire face aux différents défis et aussi dégager des ressources supplémentaires pour le financement des dépenses sociales. Car bien gérer, la dette est un puissant facteur de développement, elle peut agir comme stimulus économique et sans cette dernière, nous ralentirions notre rythme de croissance et de développement.

Publié:
Copyright © 2021, Institut Congo de demain