La capitalisation des analytics dans la gestion d’un portefeuille d’assurance

Si la science des données est aujourd’hui d’un apport important dans le management des entreprises et des organisations, il existe des domaines où cette science qui combine les mathématiques, la statistique, les probabilités et l’informatique se place de plus en plus au cœur de métier. C’est le cas du secteur de l’assurance. En effet, les assurances qui ont pour but principal de couvrir les risques qui menacent le quotidien des individus et des entreprises nécessitent de plus en plus le support des analytics afin de mieux gérer et quantifier les risques qui restent soumis aux principes d’incertitude et font intervenir les lois des probabilités et de statistique.

Tous les agents économiques (les particuliers comme les entreprises) sont exposés à des aléas : incendie, accidents, décès, maladie, faillite, chômage etc. dont les conséquences financières pourraient menacer leurs patrimoines. Dans certains cas, leurs fortunes personnelles (ou fonds propres) ne suffiraient même pas à y faire face. L’assurance intervient donc pour permettre aux individus ou aux entreprises de surmonter les conséquences financières liées à la réalisation d’un risque qui affecte leurs patrimoines.

Une opération d’assurance permet de faire un transfert de risque entre un individu ou une entreprise (assuré) et une entreprise d’assurance (assureur) qui garantit à l’assuré des prestations en vue de le remettre à son état initial avant la réalisation du sinistre. La notion du risque est inhérente à la nature de l’assurance, et donc, il existe trois principes fondamentaux qui forment l’essentiel de l’activité de l’assurance qui sont : l’évaluation, l’atténuation et le transfert du risque.

Le caractère futur et incertain du risque assuré ou à assurer pousse l’assureur à mettre en place un certain nombre de mesures qui lui permettent de gérer le risque qu’il porte. Et aujourd’hui, le métier des analytics intervient en grand support à celui de l’assurance.   Traditionnellement, que ce soit en assurance vie – faisant intervenir des produits d’épargne et de capitalisation – qu’en assurance non-vie dite aussi assurance IARD (Incendie, Accidents et Risques Divers), les entreprises d’assurance ont toujours utilisé des méthodes scientifiques techniques pour évaluer le niveau de risque afin d’appliquer une tarification conséquente et se garantir un niveau de sécurité pour leurs opérations. Car, si le niveau de risque est mal évalué, deux types de dangers menacent principalement un portefeuille d’assurance :

Le premier est dû à une sous-évaluation du risque. Dans ce cas, le montant de la prime à payer par le souscripteur d’assurance pour couvrir un risque donné sera à son tour sous-évalué par rapport à la sinistralité réelle durant la validité du contrat d’assurance. Et si tout un portefeuille d'assurances est affecté par ce problème de sous-évaluation de risque, l’entreprise risque vite de se retrouver dans un cas où la somme des primes collectées s’avère inférieure aux dépenses réelles engagées par l’assureur pendant la validité des contrats pour couvrir les prestations dues aux assurés. Et si une telle sous-évaluation s’étend à tout ou une grande partie du portefeuille, l’assureur ne tardera pas à se retrouver dans un état de ruine c’est-à-dire en difficulté d’honorer ses engagements vis-à-vis des assurés.

Le deuxième danger est la surévaluation. Dans ce cas, la prime de base est trop élevée, et après chargement elle le devient encore plus ; la prime à payer par l’assuré pour bénéficier de la couverture sera donc au-dessus de ses moyens ou paraitra plus que l’assuré n’a besoin de couverture (ou prestations). Ici, le portefeuille sera confronté à un problème d’adhésion – faible taux de souscription – ou de renouvellement.

Dans un contexte général, le dispositif d’assurance implique la gestion et la réduction des risques et repose sur la responsabilité partagée entre l’assureur et l’assuré. Ce qui permet le fonctionnement optimal de cette dernière, ce sont les données, la compréhension du risque, une tarification appropriée et la mutualisation du risque dans un groupe de personnes. Le terme clé en assurance est le risque. S’il est une chose que l’avènement des nouvelles technologies a mise en lumière, c'est bien le rôle central de la technologie pour le maintien et le bon déroulement des opérations dans presque tous les secteurs d'activité, notamment celui de l’assurance.

L’assurance étant une industrie axée sur les données (puisqu’elle rembourse sur base de souscription collectées), opérant dans un monde évolutif, dans lequel la technologie prend de l’ascendance, il est impératif qu’elle se concentre non seulement sur de meilleures solutions de traitement des données, mais aussi sur l'utilisation constante des données qui ont été depuis longtemps non exploitées. Aujourd’hui, à l’ère de la révolution technologique, le grand obstacle dans le secteur de l’assurance est de savoir comment les procédures traditionnelles de traitement des données, qui prennent du temps, de l'argent et manquent parfois de précision peuvent être remplacées par des procédures numériques pour une utilisation plus efficace et efficiente.

Le processus est tel que, les analytics ou l’analyse des données utilisent des algorithmes pour créer des modèles de performance flexibles au sein d’une entreprise afin de fournir aux gestionnaires des indications sur la meilleure décision à prendre dans une situation donnée. Elle présente l'avantage de respecter pleinement les contraintes et les objectifs de l'entreprise tout en rendant compte de l'impact financier. L'un des plus grands avantages de cette dernière est l'augmentation de la satisfaction des clients.

L'analyse poussée des données sert également à tirer des conclusions à partir des grandes quantités d’informations recueillies par les assureurs et permet d’aider le personnel commercial à prévoir quand ils doivent recommander de nouveaux produits à leurs clients. Par exemple, un client qui a deux ou trois polices avec une société d’assurance a plus de valeur qu'un autre assuré qui n'en a qu'une. Connaître ce genre de détails permet de concentrer l’attention là où elle est la plus judicieuse, et cette connaissance permet de maximiser la satisfaction et la rentabilité.

La capacité d'anticiper et de réagir aux changements du marché et ceux du portefeuille est une motivation essentielle pour les assurances de maintenir une fonction de risque forte. Les analytics sont une partie importante de cette capacité. En assurance, cette science peut être mise à profit, afin de créer rapidement des modèles et de les mettre à disposition des différents départements au sein de l’entreprise. En se servant de données analytics, on peut par exemple étudier les derniers chiffres concernant les taux de mortalité et les chances de survie à long terme d’une population, faire une meilleure évaluation du risque en vue d’une meilleure tarification (modélisation de la prime pure), faire une meilleure analyse des comportements à risque des assurés (suivi des risques), détecter les fraudes, faire du marketing prédictif.

Cette capacité d’analyse accrue permet de se faire une idée plus précise des profils individuels de risque. Et encore elle peut permettre de déceler qui est titulaire de quelle police, combien de polices est détenue par les clients et où se situent les éventuelles lacunes en matière de couverture. Ces lacunes se produisent très généralement lorsque les données ne sont pas liées en temps réel aux activités de souscription.

En tirant profit des résultats tirés des données analytics, les compagnies d’assurance s'intéressent aux risques liés à un cas spécifique au lieu de l’aborder dans un angle général. Cela rendra possible l’étude de la nature du risque de façon précise, en rendant le traitement client plus équitable et en tenant compte des risques réels en cause dans chacun des cas, et aussi des changements dans le comportement des clients. Ce qui leur permettra de proposer et de singulariser des offres aux assurés, à un juste prix.

Par conséquent, les entreprises d’assurances qui s’installent en République Démocratique du Congo peuvent donc s’activer pour tirer profit des analytics dans leur domaine. Mais comment, et quelle stratégie ? Car il convient de s'interroger sur la disponibilité dans le pays et au sein des entreprises d’assurance des infrastructures technologiques nécessaires à la mise en place de l’utilisation des objets connectés (IoT) pour la collecte et le traitement des données en vue d’une utilisation dans le secteur de l’assurance.

Il est vrai qu’une grande partie de la population congolaise ne dispose pas encore d’accès permanent à internet et aux outils technologiques. Le nombre d’individus utilisant par exemple des montres intelligentes connectées favorisant la collecte des données de santé de l’utilisateur - données qui peuvent être utiles aux assureurs pour évaluer le risque en assurance santé - reste quasiment nul.

Que ce soit en assurance des personnes (assurance vie, santé, accident corporel et invalidité) ou en assurance des biens(assurance des dommages), la mise en place d’un certain nombre des moyens technologiques utiles à la collectes des données fiables reste nécessaire pour prendre les analytics comme soutien au secteur de l’assurance. Mais malgré ce réel problème du taux de pénétration de la technologie dans la population - cible des assureurs -, il est important de noter que les assureurs peuvent commencer à mettre en place des systèmes leur permettant d’utiliser des données pour la construction des offres d’assurance et la gestion de leurs portefeuilles d’assurés.

En collaboration avec leurs réseaux de soins de santé, les entreprises d’assurance peuvent par exemple mettre en place des applications technologiques qui leur permettent de tenir à jour les données sur les recours aux prestations de soins de santé de leurs assurés durant la période de validité de leurs couvertures. Ce qui peut permettre aux assureurs d’établir des bons rapports sinistralité/prix (prime payée) pour des contrats d’assurance santé collective par exemple, et d’appliquer soit une surprime durant la validité du contrat, ou d’améliorer sa tarification au moment du renouvellement du contrat d’assurance.

Les assureurs peuvent proposer à leurs clients corporates disposant de flotte automobile des traceurs nouvelles générations offrant les fonctionnalités outre le GPS, la collecte d’informations sur la conduite et la gestion du véhicule assuré : vitesse, puissance de freinage, rappel du calendrier d’entretien etc. Les données collectées et analysées, renseignant sur le respect par le client d’un certain nombre des règles préalablement entendues dans le contrat d’assurance peuvent permettre à l’assureur de tirer des conclusions durant l’exécution du contrat ou lors du renouvellement. Ces moyens de suivi convenus entre assureur et assuré peuvent permettre l’application du système bonus-malus dans les offres d’assurance.

Ainsi, un client peut voir sa prime à payer au renouvellement de son contrat d’assurance minorée (Bonus) lorsqu’il a adopté un comportement minimisant la réalisation du risque ; ou n’a pas connu de sinistre. Ou inversement, peut-il subir une majoration (malus) de sa prime à payer lorsque son comportement (ou celui de ses préposés ; cas des chauffeurs d’une entreprise de transports trans urbain par exemple) a favorisé l’augmentation de la probabilité de réalisation du risque. Ou pire, a occasionné le sinistre.

Publié:
Copyright © 2021, Institut Congo de demain